France

Carburant vert : L’énergie est dans les champs

Agriculture, énergies alternatives, décarbonation du transport… Depuis quelques mois, Logivia, spécialiste du transport agricole en Bourgogne-Franche-Comté, exploite un porteur Scania G 360 hybride B100-électrique. Une solution technique « verte » qui utilise du biocarburant produit en France. Reportage au cœur d’un modèle convaincant de circuit court.

À Longvic, dans la banlieue dijonnaise, un porteur Scania de 360 ch d’allure compacte, avec ses 13mètres de longueur, quitte le quai de chargement de la coopérative Dijon Céréales. Affecté à l’année par le transporteur agricole Logivia, le véhicule file en direction du Morvan pour des livraisons en fermes de semences et autres produits agricoles. Au volant du porteur G 360 B6x2*4, Samuel Chapuis, le conducteur de l’entreprise, revient sur la singularité de son outil de travail : « Ce véhicule roule à 100 % aux énergies alternatives », s’exclame-t-il avec fierté. Premier du genre en France, ce porteur Scania hybride allie à l’électrique un biocarburant, le B100, issu du colza français. Et pour parfaire l’ensemble, un chariot électrique Moffett rechargeable au roulage vient le compléter.

 

Comme l’atteste le dirigeant et fondateur de Logivia, Sylvain Baudry, ce Scania s’avère être un outil de transition énergétique particulièrement performant : « Les émissions de CO2 sont réduites de 90 % et la baisse de la consommation de carburant avoisine les 40 %. » Jusqu’à 60 km/h, les émissions de CO2 sont même nulles… « L’autonomie électrique est d’environ 50/60 km, je ne l’ai jamais utilisée complètement puisque les batteries se rechargent en roulant », précise le conducteur. Élogieux sur son outil de travail, Samuel Chapuis souligne aussi le silence à la conduite, le confort comme le niveau d’équipements et de fonctionnalités : « Je pense notamment à l’EcoRoll, ce régulateur de vitesse qui anticipe la topographie du terrain et m’assiste dans une conduite vraiment économique ! »

Une première en France : le porteur hybride Scania G 360 B6x2*4 de la coopérative Dijon Céréales allie l’électrique au biocarburant B100.

Chemin de vie et écologie

Autodidacte, c’est ainsi que se qualifie Sylvain Baudry, aujourd’hui directeur général de Logivia, mais également directeur du pôle nouvelles énergies pour la coopérative Dijon Céréales et président régional de la Fédération nationale des transports routiers, « je suis même élu municipal d’une petite ville proche d’ici », ajoute-t-il. S’il a fait ses débuts en lavant des camions, il avait néanmoins à cœur d’entreprendre, même si, confie-t-il, « je me suis beaucoup trompé, les échecs font partie du parcours ! » Son humilité l’a amené à questionner les enjeux d’une entreprise avec, en ligne de conduite, la responsabilité sociale et écologique. Ainsi, l’entreprise Logivia a été créée en 2016 en vue de constituer un transporteur lourd des filières agricoles, animales et agroalimentaires pour les coopératives de Bourgogne, « en se donnant les moyens de la décarbonation et d’un management responsable », insiste le dirigeant. Elle est issue de la fusion de trois entreprises de transport, dont Pôle Logistique qu’il dirigeait à l’époque, sur un modèle de clients-actionnaires (Dijon Céréales, actionnaire majoritaire avec 70 % des parts, Soréal et la Coopérative Bourgogne Sud). Même s’il explique avoir appris « en marchant », « une entreprise peut être vertueuse sur ses impacts sociétaux », rappelle-t-il, s’appropriant très tôt la démarche de responsabilité sociétale des entreprises (RSE), pilier de Logivia et de ses partenaires.

 

Dans sa gestion d’entreprise, le dirigeant évoque une pyramide des responsabilités non hiérarchique qui passe par l’autonomisation des salariés et des conducteurs : « Si l’un d’eux estime qu’il doit prendre l’autoroute, il le fait. Il n’y a pas d’interdit. Chacun son rythme, et le conducteur a le sien. Samuel sait organiser sa journée, ses livraisons et conduire son Scania », continue Sylvain Baudry. Quand les charges de structures sont en moyenne de 15 % chez un transporteur, chez Logivia, elles atteignent tout juste les 3 %… Parce que chacun sait ce qu’il a à faire, et que la gestion a été expliquée, démystifiée, car, dit-il, une entreprise s’organise autour de ceux qui créent de la valeur.

Sylvain Baudry s’engage pour une décarbonation concrète du transport au service d’une agriculture durable.

Circuits courts et décarbonation

En tant que directeur du pôle nouvelles énergies pour la coopérative Dijon Céréales (regroupement de 3 400 agriculteurs de la région Bourgogne- Franche-Comté), Sylvain Baudry a pu mettre en application ses convictions : « Minimiser les procédures qui infantilisent les salariés et faire confiance. » Lorsqu’il parle circuit court, il ajoute : « Pour les salariés, ça a du sens. » Dans sa démarche, il vise même la traçabilité des énergies alternatives utilisées par ses camions. « Ce sont nos fermes qui cultivent le colza transformé en B100 pour faire rouler nos camions. Tout cela sans compromettre la production alimentaire. C’est indispensable pour la pérennité du modèle », insiste-t-il.

Chaque année, les quelque 140 véhicules de Logivia transportent près de 3,5 millions de tonnes de marchandises agricoles et agroalimentaires.

Le directeur est allé encore plus loin en manageant le développement d’un centre de méthanisation coopératif regroupant 150 agriculteurs/éleveurs qui couvre 20 % de la consommation en gaz du territoire et alimente les autres camions roulant au gaz de Logivia. Plus récemment, l’installation d’une canopée agricole photovoltaïque à Amance (70), sur une surface de trois hectares, offre non seulement une production électrique de 3,2 GWh, mais améliore aussi les conditions climatiques sous canopée (moins de stress hydrique, protection contre les variations de températures).

C’est ainsi que le dirigeant structure ses choix stratégiques : engager une décarbonation cohérente du transport, « une vraie ! », s’enthousiasme-t-il, qui répond aussi aux enjeux d’une agriculture durable. Produire en Bourgogne-Franche-Comté les carburants alternatifs utilisés par les camions, c’est dans ce sillage que Sylvain Baudry s’est inscrit dès le démarrage de l’entreprise : une orientation verte en guise de croissance. Avec un parc de 140 moteurs, dont la moitié roule déjà aux énergies renouvelables (B100 et biogaz), il n’a de cesse de renforcer cette démarche. Le nouveau Scania hybride biodiesel-électrique s’inscrit dans cette ligne et constitue aujourd’hui la solution la plus aboutie en termes de décarbonation. Et Frédéric Kapfer, directeur de la succursale Scania Bourgogne, d’interagir : « Sylvain Baudry a l’écologie chevillée au corps. Si certains clients se tournent vers les solutions alternatives parce qu’ils sont contraints, Sylvain le fait par conviction, avec cette question omniprésente : comment décarboner le mieux possible ? »

Avec deux autres coopératives agricoles régionales, Dijon Céréales a lancé la marque « Nous Autrement » visant à développer une agriculture d’avenir innovante et responsable en Bourgogne-Franche-Comté.

Un camion vertueux et innovant

Tandis que Samuel Chapuis continue ses livraisons, il démontre l’agilité de son camion lorsque, dans un hameau proche de Laroche-Vaneau (21), son porteur se faufile entre les fermes pour livrer un éleveur ; la ruelle est si étroite que le Scania frôle les maisons à l’amorce d’un virage. « Sans mon essieu directeur à l’arrière, impossible de passer ici », souligne-t-il. Ce Scania a été développé pour un travail sur terrain accidenté où les accès aux fermes sont souvent difficiles. Un régal de conduite qui offre une visibilité panoramique. Plus encore, lorsque son patron évoque les bénéfices du nouveau Scania, il s’enhardit : « C’est une réussite en termes de travail et d’écologie. Les consommations sont inattendues avec 17 litres aux 100 km au lieu des 30 litres pour un véhicule traditionnel », ajoutant même que les 2-3 % de surconsommation annoncés ont été rattrapés par la conduite économique de Samuel. Pour le dirigeant, Scania est un constructeur fiable « qui m’a accompagné dans des moments difficiles. Mais au-delà de la fidélité, il y a un bon suivi technique, commercial et après-vente », conclut-il.

Samuel Chapuis à bord du porteur Scania hybride de 360 ch.

Chez Logivia, pas de hiérarchie dans les responsabilités : on mise sur une confiance partagée et l’autonomie de chacun.

PORTER LE RISQUE DE LA NOUVEAUTÉ AVEC SCANIA RENT

« Lorsqu’il a été question de développer ce nouveau véhicule hybride B100-électrique, nous avons immédiatement orienté Sylvain Baudry vers un contrat de location de sept ans avec Scania Rent », souligne Frédéric Kapfer, directeur de la succursale Scania Bourgogne. Afin de bien accompagner ce client fidèle, il s’agissait pour Scania de proposer un cadre d’achat et d’entretien qui tienne compte des écueils liés à la nouveauté : « Nous voulions nous engager à ses côtés et ainsi porter le risque en fin de contrat », ajoute-t-il. « Comme il s’agit d’une première en France, nous n’avons de visibilité ni sur la maintenance ni sur la revente en fin de contrat, et ce n’est pas au client de porter ces inconnus », renchérit Christophe Danjoux, commercial Scania Bourgogne. Faciliter la transition énergétique de ses clients, mais pas à n’importe quel prix. En proposant ce véhicule sur mesure, en l’encadrant de l’ensemble des propositions de service Scania, contrat de maintenance et contrat de location, Scania Bourgogne a ainsi démontré son sens du service et des responsabilités. C’est aussi cela qui distingue Scania : distingue Scania : être là pour et avec le client !

Frédéric Kapfer

Directeur de la succursale Scania Bourgogne

Chiffres-clés

LOGIVIA

  • 32 millions d’euros de chiffre d’affaires
  • 140 véhicules dont 40 Scania et la moitié de la flotte roulant aux énergies alternatives (biogaz, biodiesel, hybride)
  • 184 clients
  • 180 collaborateurs dont 150 conducteurs
  • 3,5 millions de tonnes transportées par an

Trois questions à

Christophe Danjoux, commercial Scania Bourgogne

Comment la solution innovante B100-électrique a-t-elle vu le jour ?

La demande a émané de Sylvain Baudry qui savait que Scania proposait une technologie hybride. Il a testé la version diesel-électrique, et nous a interrogés sur la faisabilité d’un hybride B100-électrique. Scania est le seul constructeur à travailler et maîtriser un large panel de solutions alternatives pour adapter et livrer ce type de véhicule sur mesure. En matière d’écologie, ce véhicule est à l’avant-garde puisqu’il permet d’abaisser les émissions de CO2 de 90 % et de réduire drastiquement les consommations de carburant. Et même si le conducteur a bien en main ce Scania, il devrait encore améliorer ces chiffres avec le temps.

Quelles sont les adaptations du véhicule ?

Le moteur thermique de la double motorisation diesel-électrique a été adapté au biocarburant, plus visqueux qu’un diesel, et qui requiert des modifications sur certains filtres, des capteurs spécifiques et une programmation moteur différente. Le principe de la technologie hybride reste identique, à faible vitesse ou lorsque celle-ci est stabilisée, le moteur électrique prend le relais, avec des batteries qui se rechargent au freinage. L’anticipation à la conduite du conducteur est donc primordiale avec cette technologie,
tout comme les aides à la conduite qui favorisent doublement la frugalité du Scania hybride.

Ce véhicule est-il une prouesse technologique ?

Il s’agit d’une première ! Si les véhicules hybrides sont déjà Crit’Air 1, cette solution représente pour Sylvain Baudry un premier pas vers l’électrification et lui permet de renforcer sa démarche de décarbonation. Pour aller encore plus loin, il a demandé au carrossier Lapalus l’installation d’un chariot électrique Moffett dernière génération qui peut aussi se recharger entre deux livraisons sur le camion. En cela, c’est une belle histoire, une solution sur mesure.