Magnus Mackaldener
Directeur R&D - développement chaîne
cinématique du groupe TRATON
Fredrik Allard
Vice-président directeur e-mobilité
du groupe Scania
Mobilité électrique, Scania redouble d'énergie
L’inauguration de la nouvelle unité de fabrication de batteries à Södertälje en Suède, le 5 septembre dernier, soutient l’engagement ambitieux de Scania vers la mobilité 100 % électrique et sa stratégie pour aborder l’avenir avec des solutions de transports durables et rentables. Retour sur cette dynamique en faveur du transport électrique avec Fredrik Allard, vice-président directeur e-mobilité du groupe Scania et Magnus Mackaldener, directeur R&D - développement chaîne cinématique du groupe TRATON.
Quels sont les grands axes de la stratégie d’électrification de Scania ? Et quels sont vos objectifs ?
Magnus Mackaldener :
Scania a toujours abordé le marché avec une approche modulaire. Nous disposons d’une sélection de cabines, de moteurs, d’essieux et de boîtes de vitesses, notamment, parmi lesquels nos clients peuvent choisir. Nous pouvons ainsi configurer le véhicule répondant précisément à leur besoin. C’est une approche tout à fait unique sur le marché.
Nous avons la même approche dans notre évolution vers le véhicule électrique. Nous avons développé une offre de batteries hautes performances capables de s’adapter à nos différents châssis, basée sur une cellule électrique de nouvelle génération, aujourd’hui la plus écologique du marché. Nous avons mis au point un moteur électrique haute performance. Ces éléments font désormais partie de notre boîte à outils et peuvent s’adapter aux différents véhicules de notre gamme. Là où certains constructeurs ont développé quelques modèles électriques pour compléter leur offre, le plus souvent pour des applications urbaines, nous nous donnons les moyens d’électrifier toute notre gamme.
Notre nouvelle usine de batteries est opérationnelle depuis octobre et nous avons une ligne de fabrication de véhicules électriques qui produit depuis novembre. Notre objectif en Europe est de vendre 50 % de nos véhicules équipés d’une motorisation 100 % électrique d’ici à 2030 et 100 % d’ici à 2040.
« Scania produira 100 % de véhicules électriques d’ici à 2040. »
Magnus Mackaldener
Directeur R&D - développement chaîne cinématique du groupe TRATON
Quels sont les éléments à réunir pour que le véhicule électrique soit la solution adaptée pour vos clients ?
Magnus Mackaldener :
Nos clients veulent être sûrs de pouvoir assurer leur trajet au quotidien avec une seule charge, voire deux s’ils peuvent charger pendant la pause déjeuner. Nos batteries permettent aujourd’hui une autonomie jusqu’à 350 km. Nous aurons d’ici quelques années des packs de batteries avec 450 km d’autonomie.
La seconde question de nos clients porte sur le retour sur investissement. Ici, le facteur clé est l’écart de prix entre le diesel et l’électrique. Si la réponse dépend en grande partie des politiques gouvernementales spécifiques à chaque pays, il est clair que l’évolution à la hausse des carburants fossiles et à la baisse des énergies propres poussera progressivement une part croissante du marché vers l’électrique.
Mentionnons enfin que la disponibilité d’infrastructures de charge en route sera un élément important dans un second temps, pour du transport longue distance. Nous avons investi 500 millions d’euros en collaboration avec le groupe Volvo et Daimler dans une start-up appelée Milence, dont l’objectif est d’installer 1 700 points de charge à haute capacité en Europe d’ici à fin 2027. Nous rencontrons également les fournisseurs d’énergie et les collectivités pour accélérer leurs investissements dans ce sens.
Quel est aujourd’hui l’écart de prix entre un camion diesel, hybride et électrique ? Et demain ?
Fredrik Allard :
À l’heure actuelle, un camion 100 % électrique représente un investissement 3,5 fois supérieur à celui d’un camion à moteur diesel. Il existe le même écart de prix entre un véhicule hybride et un véhicule diesel. Ainsi, les véhicules électriques et les véhicules hybrides sont à peu de chose près au même prix aujourd’hui.
Nous nous attendons à voir l’écart de prix entre diesel et électrique tomber à un facteur 2 d’ici environ trois ans, puis à un facteur 1,7 à l’horizon 2030. Il arrivera un moment où l’écart de prix se comblera entièrement.
La raison tient à une économie d’échelle dont bénéficiera l’électrique avec la montée en puissance des ventes. À l’inverse, l’augmentation du prix du gasoil au-delà de 2030 se conjuguera au recul des volumes de production de véhicules thermiques, pour pousser à la hausse le coût de revient des camions diesels. Les investissements continus nécessaires à l’adaptation des moteurs aux normes antipollution successives devront également être amortis sur un nombre moins important de véhicules thermiques.
Quels sont les principaux investissements consentis par Scania dans le cadre de sa stratégie électrique ?
Fredrik Allard :
Nous avons investi 150 millions d’euros dans notre nouvelle usine de batteries de Södertälje. À cela se sont ajoutés 75 millions d’euros pour réaliser notre ligne de fabrication de véhicules électriques, dont la production a démarré au mois de novembre. Nous avons consacré 150 millions d’euros à notre investissement dans Milence. Et nous avons investi 15 millions d’euros dans un nouveau laboratoire de test de batteries.
Parallèlement à ces investissements, nous consacrons depuis plusieurs années environ 200 millions d’euros par an à nos dépenses de R&D pour développer notre chaîne de propulsion électrique. Et ces dépenses vont se poursuivre sur les prochaines années.
« En plus de notre nouvelle usine de batteries et de notre nouvelle ligne de production de châssis à propulsion électrique, nous investissons 200 millions d’euros par an dans nos efforts de R&D pour développer nos véhicules électriques de demain. »
Fredrik Allard
Vice-président directeur e-mobilité du groupe Scania
L’hydrogène a souvent été présenté comme une alternative possible à la batterie électrique. Quelle est la position de Scania ?
Fredrik Allard :
L’hydrogène n’a de sens que s’il est produit à partir d’électricité provenant de sources renouvelables (photovoltaïque, éolien ou hydro). Or entre la production de l’hydrogène par électrolyse, le transport, le stockage, puis la reconversion en électricité par la pile à combustible du véhicule, seule 25 % de l’énergie initiale parvient effectivement à la chaîne de propulsion. Par comparaison, dans le cas d’un véhicule électrique avec batteries, 75 % de l’énergie initiale est réellement utilisée pour la propulsion. Un véhicule à hydrogène représente par ailleurs un budget deux fois supérieur à celui d’un véhicule électrique avec batteries.
C’est pourquoi nous avons choisi d’axer notre stratégie de développement sur l’électrique et d’y consacrer l’essentiel de nos investissements. Pour autant, l’hydrogène a du sens pour certaines applications, notamment pour le transport sur des longues distances, sans possibilité de charge électrique en route.
Selon les prévisions de TRATON, l’hydrogène pourrait représenter en 2030 jusqu’à 10 % des ventes de camions pour du transport longue distance et 20 % des ventes de bus pour des liaisons interurbaines.
Quelles opportunités ce virage vers l’électrique offre-t-il aux salariés du groupe Scania ?
Magnus Mackaldener :
Il y a dix ans, seuls quelques-uns de nos ingénieurs travaillaient sur l’électrification.
Aujourd’hui, la moitié de nos 5 000 ingénieurs travaillent sur le sujet. Nous avons certes recruté quelques experts, mais la plupart de nos ingénieurs investis aujourd’hui sur la chaîne de propulsion électrique ont évolué en interne, passant des anciennes technologies aux nouvelles. La même chose est en train de se produire dans les ateliers de notre réseau. Nous apportons le soutien nécessaire à nos techniciens pour graviter vers les technologies d’avenir et se former au quotidien. Nos équipes sont notre richesse et nous sommes déterminés à les emmener dans notre transformation.
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